« Merde française », « Français, sous-tribu », « I francesi fora (« les Français dehors ») », « Arabi fora » (« les Arabes dehors »), « la valise ou le cercueil ». Ces pancartes ont sali les murs de la Corse après les manifestations qui ont suivi l’attaque meurtrière d’Yvan Colonna contre la centrale d’Arles (Bouches-du-Rhône) le 2 mars. Depuis cinq semaines, l’île vit au rythme des rassemblements et des émeutes, portés par des slogans parfois xénophobes et violents. Ces démarches font d’Yvan Colonna un “témoin de l’affaire Corse”, condamné en 2011 à la prison à vie pour l’assassinat en 1998 du préfet corse. “A chaque fois on évite le pire, mais je ne veux pas qu’un drame se produise, car je vis ici avec ma famille et je veux rentrer chez moi le soir”, avoue, sous couvert d’anonymat, un policier installé sur l’île. pendant dix ans. . Il dit que la haine des jeunes émeutiers qui promettent à la police de les “tuer” “fait peur”. Comme certains fonctionnaires, comme “beaucoup de continents”, il préfère se taire dans un dépôt de poudre à ciel ouvert où les mots sont des armes tranchantes.
“Nous n’avons pas le droit de critiquer”
Le mouvement de contestation étudiante chute aussi vite qu’il monte. Trois semaines de tension et de violences civiles : “On sent encore cette couche de plomb”, constate un enseignant du lycée Laetitia-Bonaparte d’Ajaccio. “Tout le monde a été surpris par le degré de violence et tout le monde marchait sur des coquilles d’œufs pour essayer de faire tomber les obstacles”, poursuit-il. À sa fondation, les cours se transformaient parfois en “thérapie de groupe”, avec des discussions animées autour de l’affaire Yvan Colonna. “Qu’est-ce que la construction d’un mythe?” Il y a vingt-quatre ans, le mouvement nationaliste lui-même disait que le commandant qui a tué le préfet d’Erignac venait d’un brigadier, aujourd’hui on en vient à dire “Yvan, gloria à tè, Gloire à you, Yvan” : comment en sommes-nous arrivés là ? s’interroge l’enseignante face à cette nouvelle génération qui n’est pas née le 6 février 1998, lorsque le préfet de Corse a reçu trois balles dans le dos. Dans sa classe, les discussions ont tourné à la proclamation, par certains élèves, de “contrats”, “des slogans politiques abusés”. L’omniprésence de ce sermon est, selon lui, le signe, « d’une sorte de pensée solidaire, de pensée juste », que diffusent les nationalistes sur ces questions, interdisant souvent les débats contradictoires. C’est aussi le symptôme d’une “manipulation” de la jeunesse, ce que les mouvements nationalistes nient. Il ne vous reste plus qu’à lire 67,5% de cet article. Ce qui suit est réservé aux abonnés.