L’attaque diabolique du Danois, aidée par son infatigable coéquipier Watt van Aert, s’est avérée décisive. Désormais avec une avance de plus de trois minutes au total sur le vainqueur 2021 et 2020, on ne voit pas comment le maillot jaune pourrait tomber des épaules carrées de Vingaard jusqu’à dimanche. Ce duel devrait durer longtemps. Si pour l’édition 2022, le coup de grâce a certes été prononcé jeudi, la rivalité entre Pogacar et Vingaard a tout pour devenir le feuilleton cristallisant des années à venir. Il y a, au fond, quelque chose de rafraîchissant. Quand le Slovène est tombé dans la descente des Spandelles, combien, à la place du Danois, auraient sauté sur l’occasion pour dépasser son rival ? Wingegard, en revanche, a jugé préférable d’attendre que Pogakar monte en selle et revienne vers lui. Sans doute l’offre n’était-elle pas totalement indifférente, le maillot jaune y trouve un partenaire de promotion. Mais l’image du « chèque » entre les deux amis a déjà fait le tour des réseaux sociaux et représente un exemple de sportivité. Leur étreinte au crépuscule de chaque étape est un nouveau classique et le sourire du Slovène n’est en rien altéré par sa défaite normale (1’04 de retard à l’arrivée, 3’26 au général). S’il boit du champagne dimanche, Vingaard pourra servir une double coupe à Wout van Aert. Après trois semaines de matchs, il est vraiment difficile de trouver des superlatifs pour décrire la hauteur de ses performances. Parti comme à son habitude dans la première échappée, dès le kilomètre 0, le Belge a mené le train qui s’est formé avec un Thibaut Pinot (Groupama-FDJ) toujours frustré et un Daniel Felipe Martinez (Ineos-Grenadiers) finalement agressif, mais très juste. Mieux, il passe le Col de Spandelles en tête, jusqu’à ce qu’il aperçoive un maillot à pois que Vingaard finit par arracher du nez et de la barbe d’un Simon Geschke (Cofidis) en larmes. Les prouesses de Wout van Aert ont été rendues absurdes lorsque son rythme dans les pourcentages plus élevés de Hautacam était tel qu’il a brisé un Tadej Pogacar en flagrant délit tout en permettant à Vingaard de rouler vers la victoire. A priori, il sera difficile de convaincre les néophytes que Van Aert, finalement troisième à l’arrivée après avoir vérifié son effort et laissé passer Pogacar, est tout sauf un grimpeur né. Derrière les deux lourds, l’étendue des vides est vertigineuse. Il y a un gouffre entre le duo Pogacar-Vingegaard et le reste du monde. Troisième du général, Geraint Thomas (Ineos-Grenadiers) accuse un retard de huit minutes sur le Danois. Pourtant, sa place sur le podium semble assurée puisque David Gaudu, nouveau quatrième, est à trois points (11’05). Le Britannique de Groupama-FDJ est resté, aidé encore une fois par Valentin Madouas, pour prendre position. Nairo Quintana (Arkéa-Samsic), cinquième, est relégué à deux minutes de Gaudu et ne devrait pas disputer le contre-la-montre de samedi. En revanche, l’affaire est beaucoup moins bonne pour Romain Bardet (Team DSM, 16’11). Ses 5 derniers espoirs se sont estompés à mesure que les pentes du Hautacam s’élevaient.