Tous les indicateurs sont au rouge dans le clergé québécois : le nombre de prêtres, de religieuses, de fidèles, de fondations et la santé des finances de l’Église. Selon Statistique Canada, environ la moitié (51 %) des catholiques âgés de 15 ans et plus au Québec participaient à des activités religieuses au moins une fois par mois en 1985. De 2017 à 2019, ce pourcentage avait diminué de moitié (26 %).
Vivant à travers la migration
L’abbé Pierre Gingras, curé responsable de la paroisse Notre-Dame-de-Foy à Québec, peut le constater. Il a fermé trois églises au cours de sa carrière, dont Saint-Jean-Baptiste, en 2015, classées exceptionnelles par le ministère de la Culture. Il sait que cela découragera les autres.
C’est dramatique. Je trouve ça triste, déplore le prêtre.
Il y a six églises dans sa paroisse, mais assez de fidèles pour n’en remplir qu’une. Les nouveaux venus, qui représentent un tiers des fans, permettent toutefois de garder certains d’entre eux ouverts.
Leur contribution est si importante que chaque samedi soir, un service a lieu en espagnol. Une version portugaise sera bientôt disponible. C’est sans compter la messe mensuelle de saveurs africaines.
La messe en espagnol a lieu tous les samedis à l’église Saint-Mathieu de Sainte-Foy.
Photo : Radio Canada
Phase de rupture
Selon Gilles Routier, l’accélération au banc a commencé dans les années 1980. De 1920 à 1960, la religion catholique était à son apogée. La plupart des familles québécoises décorent leur maison d’une croix. L’église est alors responsable de l’éducation, de la santé et des services sociaux. L’église a joué un rôle de soutien, explique-t-il. Inévitablement, il fixe un certain nombre de normes morales chez les Québécois. Certains prêtres dictent même aux familles comment agir à l’intérieur de leurs maisons et chambres. L’État reprend ses responsabilités entre les années 1960 et 1980. Certains Québécois veulent alors rompre avec leur passé et s’affranchir du paternalisme de l’Église. « Il y a, au Québec, un ressentiment, sinon une haine du catholicisme. […] Les Québécois ont encore des comptes à régler avec l’Église. » — Une citation de Gilles Routhier, professeur de théologie à l’Université Laval et stratège principal au Séminaire de Québec L’abbé Pierre Gingras observe également que ce sont surtout les baby-boomers qui ont quitté les églises. On voit surtout des personnes âgées et des jeunes redécouvrir leur côté religieux, souligne-t-il. Pierre Gingras est le curé responsable de la paroisse Notre-Dame-de-Foy. Photo : Radio Canada C’est le cas d’Antoine Malenfant, un homme de 37 ans, rédacteur en chef du magazine religieux Le Verbe. Il va à l’église deux fois par semaine. Il y rencontre sa femme avec qui il a huit enfants. Nous attendons nos 9ème et 10ème. Notre deuxième paire de jumeaux. […] C’est écrit sur mon visage que je suis l’éthique sexuelle de l’église, dit-elle en riant. Antoine Malenfant est rédacteur en chef du magazine religieux Le Verbe. Photo : Radio-Canada / Bruno Boutin Antoine Malenfant est lui aussi issu d’une famille nombreuse. Mes parents nous ont transmis ce qui était le plus important pour eux et c’est ce que je compte faire avec mes enfants. La religion catholique l’aide à donner un sens à sa vie, lui permet de surmonter les difficultés et lui donne le sens de la communauté. « Les gens ne viennent plus à l’église par commodité. Autour de moi, il y a beaucoup de jeunes familles qui vont à l’église et le font par choix. » — Citation d’Antoine Malenfant Que les églises soient vides lui importe peu. Il aime que les croyants qui bougent le fassent par choix et par conviction. Nous nous rapprochons de plus en plus du but de Christ.
Abus au sein de l’Église
Les croyants comme Antoine Malenfant sont peu nombreux, note Gilles Routhier.
Selon lui, les scandales sexuels impliquant des prêtres pédophiles et les pensionnats autochtones ont contribué à la baisse du trafic. Cela ne se produit pas seulement parmi les peuples autochtones, et cela continue à construire l’idée que tout ce que l’église a fait, ce sont des abus, dit-il.
Il y a 24 recours collectifs au Québec contre des diocèses et des congrégations religieuses. Plus de 2 500 Québécois attendent justice devant les tribunaux. Pierre Bolduc est l’un d’entre eux.
Pierre Bolduc poursuit le diocèse de Québec pour des agressions qu’il aurait subies dans les années 1960 à Thetford Mines.
Photo : Radio Canada
Dans les années 1960, il aurait été agressé sexuellement à plusieurs reprises par son curé.
Il estime également que les attentats ont contribué à vider les églises. C’est difficile à quantifier, mais cela n’a pas aidé. Lui-même, en tout cas, admet qu’il a perdu la foi pour cette raison.
L’avenir de l’Église catholique au Québec
Ce n’est pas la première fois de son histoire que l’Église catholique traverse une période difficile. Penser que c’est fini est une grande illusion, mais il faut attendre une longue traversée du désert, explique Gilles Routhier, faisant référence à des passages de la Bible.