Concentration de jeunes et de vigiles sur les dents. Les entrées de la Sorbonne, dans le centre de Paris, restent fermées ce mercredi après-midi. Certains sont bloqués de l’intérieur par de solides cadenas. Les autres étaient surveillés par de solides gardes. Devant, quelques groupes d’étudiants attendent calmement. Certaines personnes font de leur mieux pour entrer à l’université en négociant la sécurité ou la coercition. Avec plus ou moins de succès. Mercredi, dans les couloirs de la Sorbonne, des tags contre les élections. (Corentin Fohlen / Libération) A l’intérieur, quelques centaines d’étudiants ont pris le contrôle d’une partie de l’établissement suite à une convocation à une assemblée générale « Contre la fraude du second tour ». Il y avait des jeunes invités des universités de Paris – la Sorbonne, donc, mais aussi Paris-VIII, l’ENS Jourdan et le Paris Nanterre – mécontents du vote de ce week-end et du système politique actuel. Dans les couloirs, étiquettes implacables : « Ni Macron ni Lepen », « Le fascisme tue, combattons-le », la “Pierre par pierre, nous détruirons Emanuel Macron” ont été mis en évidence. Dans le même temps, certaines issues étaient bloquées par des piles de tables et de chaises. Dans l’un des imposants amphithéâtres du collège, qui a été commandé pour l’occasion, nous nous parlons, discutons que faire et que faire des événements. Certaines chansons de gauche antifascistes et révolutionnaires sont également chantées. Les échanges sont retardés et les journalistes ne sont pas vraiment les bienvenus.

“C’est difficile pour les jeunes qui ne se sentent pas du tout représentés”

“Il y a beaucoup d’allégations et il est impossible de parler au nom de tous”explique Léo (1), un grand et mince de 23 ans aux cheveux longs et une e-cigarette à la main, qui nous a permis d’accéder aux installations où la plupart de nos collègues étaient restés à la porte. “De manière générale, je pense qu’on peut dire sans trop de pluie qu’on est tous contre ce second tour où s’opposent l’extrême droite et le super-libéralisme. “C’est vraiment difficile pour les jeunes qui ne se sentent pas du tout représentés.” L’étudiant en mathématiques, habitué des mouvements sociaux, évoque le manque d’ambitions sociales d’Emanuel Macron et de Marin Le Pen. Et particulièrement “L’absence d’un véritable programme de lutte contre le réchauffement climatique” : «Le GIEC nous dit que nous avons trois ans pour changer les choses. Et là, on est reparti pour encore cinq ans avec des gens au pouvoir qui s’en foutent. “On va droit au désastre, on n’est peut-être pas là à l’âge de nos profs pour en parler, et pour l’instant on débat encore de l’interdiction ou non des pailles en plastique.” Les étudiants appuyés contre la fenêtre défient certains de leurs camarades de classe de rester dehors pour manger. (Corentin Fohlen / Libération) Quelques mètres plus loin, les élèves prirent place dans les salles de classe. Adossés à la fenêtre, certains crient à leurs camarades restés dehors pour leur envoyer de la nourriture, des bières et des paquets de gâteaux surtout. De quoi durer plusieurs heures, voire toute la nuit si l’occupation continue. D’autres reconstruisent le monde, discutent des élections précédentes et imaginent, à travers des mouvements comme le leur, “Rendre le pouvoir au peuple”. Le tableau indique le nombre d’avocats et d’associations qui sont appelés en cas d’intervention policière, tandis que sur le tableau figurent des tracts qui énumèrent les droits de chaque personne en cas d’arrestation.

Appel à la mobilisation générale

Gaïa, la vingtaine à peine, cheveux blonds, sourcils percés et crop top bleu, est contente de voir “Beaucoup de jeunes qui n’ont pas les mêmes idées se rassemblent et parviennent à un accord par la discussion”. Une façon, selon eux, de s’en sortir “Système pseudo-démocratique” dans lequel “Le pouvoir est entre les mains des plus puissants” et où les citoyens n’ont que la possibilité “Élire le roi de la bourgeoisie tous les cinq ans”. A ses côtés, Axel (1), cheveux noirs couchés et lunettes rondes sur le nez, fait un clin d’œil au chef : “Ce genre d’action nous permet de nous rappeler que nous ne sommes certes que des fourmis, mais que beaucoup de fourmis d’un bout à l’autre peuvent nous permettre de mettre la pression sur les élites. “Maintenant, nous devons être encore plus nombreux pour que les choses se produisent.” Tout le monde appelle les étudiants à travers le pays, et au-delà, à prendre le contrôle de leurs universités et à manifester dans les prochains jours afin que l’action ne se transforme pas en pétard mouillé. Pendant ce temps, la Sorbonne reste occupée. (1) Les prénoms ont changé.